Que je le veuille ou non, mon accouchement, mon séjour à la maternité et finalement, les premiers jours en famille à la maison m’avaient, en quelques sortes, coupée du reste du monde. Ceci n’était pas volontaire, mais vu la tournure des évènements, tout notre temps à James et moi avait été consacré à l’arrivée de ces deux enfants dans notre vie; l’installation, la présentation aux aînés. Finalement, malgré quelques imprévus, tout s’était relativement bien passé, et de ce fait, nous pouvions commencer à souffler un peu, et pour ma part, je pouvais commencer à prendre des nouvelles de mes proches. Enfin, une personne en particulier surtout; effectivement, alors que j’étais encore à la maternité, j’avais eu vent comme quoi les choses n’allaient pas pour le mieux entre Emmalee et Ysmaël, et que plus encore, qu’Emmalee avait choisi d’aller s’installer à l’hôtel. Inquiète par rapport à tout cela, j’avais pris la décision de laisser ma petite famille ne serait-ce qu’une petite heure pendant que les jumeaux dormaient et que les aînés étaient à l’école et à la garderie pour aller voir ma belle demie-sœur, ne voulant pas me résigner à la laisser ainsi. Je savais ben qu’en quelques sortes, je venais me taper l’incruste dans sa vie, mais dans le pire des cas, si elle ne voulait pas en parler, alors je ne ferais que prendre de ses nouvelles, tout pour me rassurer un peu. Sitôt que je le pus, je me préparai, et je pris la voiture pour me rendre à l’hôtel, n’ayant pas encore la force de marcher sur de longues distances. À la réception, je demandai le numéro de chambre de la jeune femme, et sans attendre plus longtemps, je me rendis à sa porte, puis j’y frappai, espérant simplement que j’obtiendrais une réponse.

Cela prit quelques secondes, mais finalement, je parvins à obtenir une réponse de la part de ma belle-demie sœur qui finit par m’ouvrir la porte. Ne sachant pas vraiment comment prendre l’expression qu’elle me servit, je me contentai de lui faire un petit sourire timide, même si en fait, j’aurais voulu l’aborder autrement. En effet, entre Emmalee et moi, tout s’était toujours bien passé, nous avions toujours passé de bons moments ensemble, nous nous étions toujours soutenues dans les plus difficiles. Mais là, j’avais l’impression que je dérangeais plus qu’autre chose, ou plutôt, qu’Emma’ était déçue de me voir. Et si je la dérangeais ? Cela pourrait être une possibilité, et cette possibilité demeura présente dans mon esprit même lorsque la jeune femme me précisa que sa réaction était due au fait que ce n’était pas moi qu’elle attendait, mais plutôt son petit-ami, Ysmaël. J’accueillis son propos dans un haussement d’épaules, histoire de lui montrer que je n’étais pas vexée, même si j’aurais voulu lui rendre service un peu plus que cela, limite me transformer en Ysmaël pendant une minute. Cependant, puisque ce n’était pas possible, je me contentai de simplement accepter son invitation à entrer dans la chambre d’hôtel dans un petit sourire. Sitôt que je fus à l’intérieur, je ne m’attardai pas très longtemps à considérer la décoration, puisque pour avoir vécu dans une suite pendant un petit moment, je savais très bien à quoi cela ressemblait, et je portai directement mon attention vers ma belle-demie sœur, lui disant d’emblée : « Écoute, je ne voulais pas te déranger… Je voulais juste voir comment tu allais. Je me fais du soucis pour toi… » Je la considérai ensuite en me mordillant la lèvre inférieure, attendant de voir ce qu’elle me répondrait avant d’ajouter quoi que ce soit.

Un peu plus rassurée, je fis un petit sourire au moment où Emmalee rectifia quelque peu la situation en me disant que je ne la dérangeais pas. Après, je savais toujours que je n’étais pas celle qu’elle aurait voulu voir, mais je me sentais un peu plus confortable d’être là que je ne l’étais quelques secondes auparavant. Enfin, je le fus suffisamment pour accepter l’invitation de ma belle demi-sœur à m’asseoir, ce qui fit en sorte que je n’attendis pas plus longtemps pour prendre place dans un canapé non loin du lit où Emmalee, elle, avait décidé de s’installer. Puis, une fois que je fus installée relativement confortablement – c’à quoi je me devais de faire attention, vu que ma cicatrice n’était pas encore totalement insensible – je répondis à mon amie en affirmant : « Bah écoute, c’est pas encore totalement la grande forme, mais ça va ! » Je terminai mon propos par un petit sourire en coin, choisissant de ne pas m’étaler pendant des heures sur la question. Effectivement, je me voyais plutôt mal parler de ma vie de famille qui allait relativement bien, malgré les moments de stress et d’émotions des derniers jours. Cependant, je savais bien que ce n’était rien comparativement à ce qu’Emmalee et Ysmaël pouvaient vivre. J’en avais eu quelques échos lorsque j’avais appelé Maël pour lui annoncer qu’il était de nouveau tonton, mais dans le cas d’Emma, je ne me voyais pas parler des heures de mes enfants, surtout que si celle-ci était dans cette chambre, elle ne devait pas voir sa fille et son fils, et je me doutais bien que cela devait être particulièrement difficile. Histoire que la discussion ne s’étale pas longtemps sur la question et en devienne pas trop délicate, ou du moins, pas sur ce sujet, je m’empressai ensuite de lui demander : « Et toi alors, comment tu vas ? », espérant sincèrement qu’Emmalee serait encline à en parler, ou du moins, simplement répondre à ma question, histoire que je me sente moins inquiète pour elle, ou plus, si jamais ça n’allait vraiment pas.

Même si Emmalee rit légèrement à sa remarque, pour ma part, je ne pus m’empêcher d’esquisser un sourire triste, ne cherchant même pas à insister sur le fait qu’il faudrait éventuellement qu’elle rencontre mes deux derniers fils, nés tout récemment. Peut-être que dans d’autres circonstances, j’aurais pu lui dire qu’on s’en moquait bien de ses yeux bouffis, que les jumeaux ne le remarqueraient même pas, vu leur très jeune âge, mais je me doutais bien que cela venait d’une douleur plus profonde, à savoir celle de ne pas pouvoir voir ses enfants. C’était d’ailleurs ce qui expliquait pourquoi j’avais décidé de ne pas les emmener, ce que j’aurais dû naturellement faire, compte tenu que pour le moment, je demeurais un frigo mobile pour ces deux amours. Toutefois, je ne le regrettai pas, puisque les propos tenus par la suite par ma belle demi-sœur me confirmèrent que j’avais bien fait de venir seule. Ne sachant pas trop quoi dire dans un premier temps, je baissai la tête, réfléchissant à ce que je pourrais lui répondre. Je ne me voyais pas vraiment de se bouger les fesses pour se faire pardonner auprès d’Ysmaël, puisque tous deux souffraient de la séparation, parce que je ne pouvais pas la forcer à faire quoi que ce soit. Toutefois, je me permis quand même de lui demander : « Tu… Vous en avez reparlé depuis que tu t’es installée ici, ou pas ? » Après avoir posé ma question, je relevai le regard, déglutis, et je regardai mon amie pour guetter sa réaction, espérant simplement ne pas la vexer de quelconque façon ou pire encore, la rendre encore plus malheureuse qu’elle ne semblait l’être par mes interrogations qui, au fond, avaient pour but de tenter de l’aider. Après tout, si jamais elle m’envoyait bouler, ça n’avancerait à rien. J’allais m’assurer que ça n’arrive pas à ce point, quand même, parce que je ne voulais pas affecter notre relation pour autant, tenant sincèrement à ma belle demi-sœur.

Mon but n’était pas du tout de faire passer un interrogatoire à ma belle demie sœur en lui demandant ce qui se passait avec son petit-ami, comment les choses avaient avancé, mais il n’en demeurait pas moins que je ne serais pas contre le fait d’en savoir un peu plus, histoire de pouvoir lui venir en aide autant que possible. Pour le moment, j’étais au courant de ce qu’Ysmaël m’avait dit lorsque je l’avais appelé pour le prévenir – et Emmalee aussi, naturellement – de la naissance de Liam et Noah, et du fait que la jeune femme était maintenant dans cette chambre d’hôtel. Bref, il était normal, en mon sens, que je lui pose des questions, en m’assurant d’être délicate pour ne pas m’imposer, et par conséquent, j’aurais voulu en savoir davantage sur ce qui s’était passé sur cette fois où le jeune couple s’était revu, mais avant que je n’aie l’occasion de lui demander, mon amie commença à pleurer, ce qui me poussa tout naturellement à ne rien demander d’autre, ce qui aurait été tout simplement cruel dans le cas présent. En la regardant effectuer une tentative pour reprendre une certaine contenance, mon instinct maternel prit immédiatement le dessus, puis je m’empressai de m’approcher d’elle afin de la prendre dans mes bras en lâchant un tout naturel, et bien impertinent « Oh Emma… » Cependant, tout de suite après, je ne dis rien d’autre, me contentant de la serrer contre moi en tentant de me montrer la plus réconfortante qui soit, même si peu de temps après, je ne pus m’empêcher d’ajouter, instinctivement : « Ça va s’arranger… Ne perds pas espoir… »

J’aurais donné n’importe quoi pour être en mesure de conseiller ma belle demie-sœur sur sa dispute avec son petit-ami, mais lorsqu’elle me dit plus en détails ce qui s’était passé au cours de leur engueulade, ou du moins, par rapport aux mots qu’elle avait tenus, les mots se bloquèrent dans ma gorge, et je me sentis impuissante, incapable. Tout ce que je trouvai à faire dans la situation présente, ce fut de serrer un peu plus la jeune femme contre moi, puis commencer à la bercer doucement, comme il m’arrivait de le faire avec mes enfants parfois. Évidemment, je ne lui demandai pas qu’on aille s’installer dans un rocking-chair pour continuer, mais c’était la meilleure comparaison que je trouvai, puis que je regrettai, puisque pendant un instant, j’eus l’impression qu’Emma avait lu le mot « enfant » dans mon esprit. Tout de suite après que j’eus cette pensée, elle avait commencé à se traiter de mauvaise mère, m’avouant ne pas être encore allée les voir depuis qu’elle s’était installée ici. À ce moment précis, ce ne fut pas des reproches qui se formulèrent dans mon esprit, mais plutôt un sentiment de compassion que je ne saurais pas expliquer. C’était peut-être parce que moi-même, je serais incapable de supporter l’idée que mes enfants soient loin de moi pendant une durée prolongée, n’osant même pas imaginer la douleur que cela pouvait provoquer au fond de soi. Enfin, je pouvais quand même ne avoir une idée en regardant à quel point mon amie était triste, ce qui fit en sorte qu’au bout du compte, je ne pus m’empêcher de lui demander : « Ils te manquent, n’est-ce pas ? » Ensuite, je me décalai légèrement, toujours en gardant mes bras autour d’elle par contre, puis la considérer en pinçant les lèvres. Tout ce que j’espérais, c’était qu’elle ne me gifle pas après que j’aie posé cette question, mon but n’étant pas là de remuer le couteau dans la plaie, mais seulement de lui prouver, par des sous-entendus pour le moment, que non, elle n’était pas une mauvaise mère. Si elle l’avait été, elle n’aurait certainement pas éprouvé quoi que ce soit à l’idée de ne pas les voir, et en ce moment, ce n’était pas l’impression que j’avais. Après, peut-être que j’avais faux sur toute la ligne dans ma théorie, mais pour le moment, je n’avais pas vraiment l’intention d’en démordre, surtout si cela pouvait la convaincre que non, elle n’était pas indigne, simplement triste et perdue, et surtout, que les choses pourraient éventuellement s’arranger.

J’aurais donné n’importe quoi pour être en mesure de conseiller ma belle demie-sœur sur sa dispute avec son petit-ami, mais lorsqu’elle me dit plus en détails ce qui s’était passé au cours de leur engueulade, ou du moins, par rapport aux mots qu’elle avait tenus, les mots se bloquèrent dans ma gorge, et je me sentis impuissante, incapable. Tout ce que je trouvai à faire dans la situation présente, ce fut de serrer un peu plus la jeune femme contre moi, puis commencer à la bercer doucement, comme il m’arrivait de le faire avec mes enfants parfois. Évidemment, je ne lui demandai pas qu’on aille s’installer dans un rocking-chair pour continuer, mais c’était la meilleure comparaison que je trouvai, puis que je regrettai, puisque pendant un instant, j’eus l’impression qu’Emma avait lu le mot « enfant » dans mon esprit. Tout de suite après que j’eus cette pensée, elle avait commencé à se traiter de mauvaise mère, m’avouant ne pas être encore allée les voir depuis qu’elle s’était installée ici. À ce moment précis, ce ne fut pas des reproches qui se formulèrent dans mon esprit, mais plutôt un sentiment de compassion que je ne saurais pas expliquer. C’était peut-être parce que moi-même, je serais incapable de supporter l’idée que mes enfants soient loin de moi pendant une durée prolongée, n’osant même pas imaginer la douleur que cela pouvait provoquer au fond de soi. Enfin, je pouvais quand même ne avoir une idée en regardant à quel point mon amie était triste, ce qui fit en sorte qu’au bout du compte, je ne pus m’empêcher de lui demander : « Ils te manquent, n’est-ce pas ? » Ensuite, je me décalai légèrement, toujours en gardant mes bras autour d’elle par contre, puis la considérer en pinçant les lèvres. Tout ce que j’espérais, c’était qu’elle ne me gifle pas après que j’aie posé cette question, mon but n’étant pas là de remuer le couteau dans la plaie, mais seulement de lui prouver, par des sous-entendus pour le moment, que non, elle n’était pas une mauvaise mère. Si elle l’avait été, elle n’aurait certainement pas éprouvé quoi que ce soit à l’idée de ne pas les voir, et en ce moment, ce n’était pas l’impression que j’avais. Après, peut-être que j’avais faux sur toute la ligne dans ma théorie, mais pour le moment, je n’avais pas vraiment l’intention d’en démordre, surtout si cela pouvait la convaincre que non, elle n’était pas indigne, simplement triste et perdue, et surtout, que les choses pourraient éventuellement s’arranger.